Oui, tout à fait, vous avez bien lui, nous vous proposons aujourd’hui un guide de survie spécial flex office à destination des salariés. Car, ne nous le cachons pas : cette tendance qui séduit de plus en plus d’entreprises a bien du mal à mettre tout le monde d’accord. En effet, les avis sur le sujet n’en finissent pas d’être partagés. Et, pourtant, nous y sommes. Déjà en 2021, 16 % des entreprises avaient adopté le flex office et 55 % envisageaient de le faire, selon une étude menée par la société Deskeo. Les salariés y évoluant n’ont donc plus de bureaux attitrés et changent chaque jour au gré de leurs envies et… des disponibilités. Beaucoup affirment, alors, perdre leurs repères et avoir bien du mal à s’y retrouver dans ce nouvel environnement de travail.
Si le phénomène reste encore marginal en France, contrairement à d’autres pays, la crise et le contexte incertain actuel poussent les entreprises à s’interroger sur ce modèle. Jusqu’à le voir se développer ? Seul l’avenir nous le dira. En attendant, étudions ensemble ses avantages et inconvénients, mais, surtout, les solutions pour mieux le vivre. Et, surprise : l’entreprise va devoir également y mettre du sien si elle souhaite conquérir les foules.
Flex office et salariés en 2023 : où en sommes-nous ?
Le flex office fait la une de multiples médias qui en parlent comme d’une tendance incontournable de cette année. Oui, mais, voilà : force est de constater qu’en 2023, le bilan concernant sa mise en place est plus que mitigé. S’il comporte, certes, de nombreux avantages pour les entreprises, les salariés ont bien du mal à y adhérer. Pourquoi ? Plongeons ensemble dans les coulisses du modèle.
Qu’est-ce que le flex office ?
Le flex office est apparu dans les « années 1990 au sein des grands cabinets de conseil pour réduire les coûts immobiliers, car une grande partie des bureaux étaient inoccupés », confie Jean-Claude Grosjean à Welcome to the Jungle. Ce coach professionnel, auteur de l’ouvrage Culture Agile, ajoute également qu’il « s’accompagne généralement de plus d’espaces collectifs et d’éléments favorisant le bien-être du salarié« . Très bien, mais concrètement, de quoi s’agit-il ?
On le résume très souvent à l’absence d’attribution de bureaux pour les salariés. Autrement dit, chacun arrive le matin et s’assied où il le souhaite ou le peut. Le soir, il remballe ses affaires et, très fréquemment, les range dans un casier dédié. Ceci pour éviter de laisser son ordinateur, ses miettes ou sa tasse de café à celui qui prendra se place le lendemain. Et le rituel se répète chaque jour jusqu’à ce que s’instaurent une routine quotidienne et un vrai mode de travail.
Mais, à l’origine, le concept est un peu plus poussé et doit pouvoir offrir au salarié différentes possibilités. Plusieurs espaces vont donc être proposés pour booster son bien-être et sa productivité. Espaces collaboratifs, privatifs, phone box pour passer ses appels au calme, coin détente… Ainsi, il pourra choisir en fonction de ses besoins, de ses envies ou du moment de la journée. De nombreux services sont très souvent associés pour offrir un confort à toute épreuve : machine à café nouvelle génération, cuisine aménagée, office manager aux petits soins, animations tout au long de la journée…
Pas de doute, le flex office s’inspire largement des espaces de coworking dont il reprend les codes et les modes de fonctionnement. Mais qu’est-ce qui se cache derrière ce projet ambitieux ?
Pourquoi les entreprises ont-elles mis en place le flex office ?
Sandrine Vialle Lenoël, psychosociologue et psychanalyste spécialisée dans la prévention des risques professionnels, confirme :
Il y a une dizaine d’années, lorsque les premiers groupes du CAC40 ont franchi le pas, c’était essentiellement pour répondre à la faible occupation des bureaux liée, d’une part à la réduction du temps de travail, d’autre part au nomadisme de certaines équipes, notamment commerciales.
Interview de Sandrine Vialle Lenoël pour Cadremploi.fr
Et aujourd’hui ? De plus en plus d’entreprises cèdent à l’appel de cette tendance, séduites par ses différents avantages. Il faut dire qu’ils sont nombreux pour l’employeur, en particulier depuis la pandémie et le début de la crise économique. De fait, les entreprises qui y sont passées ou qui souhaitent le faire y voient, bien souvent, une opportunité de réduire leurs coûts. L’enquête réalisée par Deskeo nous indique, ainsi, que cette motivation est la première pour celles qui sont déjà en bureaux flexibles (77 %) et pour celles qui y aspirent (79 %). Arrivent ensuite une meilleure expérience humaine des salariés et une meilleure gestion vie professionnelle et personnelle pour 60 % des entreprises. Enfin, 43 % évoquent l’envie d’utiliser l’espace différemment avec davantage de salles de réunion ou d’espaces de convivialité.
En bref, l’idée s’est affirmée avec la généralisation du télétravail et depuis la crise économique. Selon Deskeo, l’immobilier est, en effet, le second poste de dépense après la masse salariale. De quoi donner matière à réfléchir. Et, finalement, quels sont les résultats aujourd’hui ? Le flex office a-t-il tenu ses promesses pour les entreprises ? Et qu’en pensent les salariés ?
Pourquoi un bilan mitigé du flex office ?
Le flex office ne semble pas faire l’unanimité à l’heure actuelle. Le bilan de Deskeo est, de fait, très mitigé. Seules 34 % des entreprises considèreraient cette transition comme étant très positive (adhésion des salariés comprise). Deux tiers des répondants dressent, en revanche, un bilan négatif ou mitigé. Voilà qui a de quoi interroger. Comment pareille chose a pu se produire, alors que les avantages offraient de si belles perspectives ?
Deskeo nous livre une analyse très intéressante sur le sujet : tout part des motivations premières des entreprises ayant fait ce choix. Ainsi, pour celles dont le bilan est positif, les intérêts des salariés ont été davantage considérés dès le départ.
L’attractivité des bureaux et une meilleure localisation sont en effet deux aspects non négligeables qui affectent l’expérience utilisateur.
Étude Deskeo
Celles qui en retirent réellement des bénéfices étaient désireuses, pour 54% d’entre elles, de renforcer l’attractivité des bureaux pour en faire un atout en matière de marque employeur. 39 % souhaitaient réduire leur surface pour une meilleure localisation. Pour celles dont le bilan est négatif et/ou mitigé, elles étaient seulement 19,5 % à privilégier l’attractivité et 5 % une meilleure localisation. La conclusion : si les intérêts des salariés sont pris en compte dès le départ comme un paramètre essentiel, les résultats sont là !
À cela viennent s’ajouter, bien entendu, une conduite du changement mal menée, des équipes peu préparées, une mauvaise évaluation des coûts et une méconnaissance du processus. Des éléments qui ne peuvent que nuire à sa mise en application. Et c’est ainsi que la grogne monte du côté des salariés.
Pourquoi les salariés sont-ils peu adeptes du flex office ? Inconvénients et risques.
Manque de préparation, sentiment de déconsidération, de désappropriation, perte de repères, déshumanisation… Ces termes parlent d’eux-mêmes. Selon Valentina Urreiztieta, directrice du pôle conseil & formation du cabinet Empreinte Humaine dans une interview pour Cadremploi.fr :
« Le télétravail se heurte à la pyramide de Maslow, qui représente la hiérarchie des besoins des salariés. L’un des étages concerne le besoin d’appartenance, qui est forcément plus difficile à combler lorsque le salarié est à distance ou n’a plus d’espace à lui. L’attachement à une entreprise passe beaucoup par l’espace physique. »
Et les témoignages négatifs n’en finissent plus de fleurir dans les médias. Des problématiques apparaissent qui remettent en question le modèle. Nous en avons fait une petite sélection, ici, pour vous :
- Difficulté à trouver une place pour travailler le matin en arrivant ;
- Impression d’une augmentation des inégalités lorsque les managers s’attribuent les « meilleures » places ;
- Rupture du lien social ou impossibilité de créer du lien dû au changement de place constant ;
- Sentiment de désappartenance avec des bureaux impossibles à personnaliser ;
- Difficulté à travailler avec son équipe et/ou son manager :
- Impression de n’être qu’un pion facilement interchangeable ;
- Perte de la culture d’entreprise…
Et si on vous disait que la liste est encore longue ? Loin de nous l’idée, bien sûr, de vous décourager de passer à ce modèle ou encore de ne pas y adhérer. Mais force est de constater que ces témoignages peuvent alarmer. Il est donc essentiel que les entreprises les prennent en compte avant de se lancer. Et si le mal est déjà fait ? Nous vous donnons des solutions pour faire bouger les choses.
Comment mieux vivre le flex office ?
Le flex office, vous le vivez au quotidien et vous souffrez des maux précédemment cités ? Sachez que vous pouvez agir, à votre niveau, en tant que salarié. Voici comment.
Communiquez sur vos ressentis !
Vous avez tout à fait le droit de mal vivre le flex office. Et, si vous êtes plusieurs à en faire l’expérience, vous avez de quoi être rassuré (ou pas) : vous n’êtes pas seul ! Alors, parlez-en ! La communication est la clé de bien des problématiques en entreprise. Nous vous invitons donc à en faire part à votre N+1. Sans lui faire des reproches, prenez rendez-vous pour lui parler de vos ressentis. Vous pouvez, aussi, suggérer des solutions, montrer que vous y avez pensé et que vous souhaitez vous investir pour que la situation s’améliore. Non, vous n’êtes pas en train de poser votre démission ou de menacer de le faire. Mais vous êtes là pour faire avancer les choses. Présenter les faits de façon positive sera toujours mieux vécu qu’adopter le loud quitting.
Rappelez les règles du flex office
Le flex office, très bien, mais à condition que les salariés puissent se retrouver quand ils le souhaitent pour travailler ensemble. Or, le concept est bâti autour de cette idée de collaboration. Si le changement de place nuit à cet aspect, ce n’est plus du flex office. Y a-t-il une salle dédiée ? Si ce n’est pas le cas, c’est à vous de rappeler les règles.
Là encore, inutile de monter dans les tours ou de créer un syndicat. L’idée est de faire remonter des points de vigilance sur les dérives d’un tel système. Si le flex office est mal appliqué, il peut nuire à la productivité des salariés. L’entreprise a donc tout intérêt à revoir sa copie si elle veut éviter les départs.
Proposez une gestion du lieu façon coworking
« Mince, la salle de réunion est encore une fois prise. » Vous aviez une réunion importante ce matin et vous voilà à errer dans tout l’open space à la recherche d’un coin tranquille. Quand vous êtes arrivé ce matin, toutes les places étaient prises et vous voilà installé dans le couloir avec tous les bruits associés ? Oui, ces problèmes peuvent malheureusement survenir pour les salariés en flex office. Mais uniquement si celui-ci a été mal anticipé.
Pourquoi ne pas proposer à votre employeur un fonctionnement façon coworking ? Si vous êtes plusieurs à être impactés, il n’y a pas de raison que les choses ne bougent pas. Suggérez, par exemple, la mise en place d’un système de réservation des places, la présence d’un office manager capable de créer du lien entre les différentes équipes et salariés. Bref, réinventez le bureau, vous vous y sentirez mieux.
Participez à la décoration du bureau
Depuis que vous n’avez plus de bureau à vous, votre plante fait grise mine chez vous. Et si c’était le moment de la ramener ? Ce n’est pas parce que vous n’avez plus d’espace à vous que vous ne pouvez pas décorer l’open space selon les envies de chacun. Réappropriez-vous l’espace en proposant aux autres collaborateurs d’apporter chacun des éléments décoratifs. Les dessins des enfants peuvent, par exemple, trouver leur place sur un mur dédié. De quoi exposer leurs œuvres d’art.
Changez de boîte !
Vous avez épuisé les précédentes solutions, mais rien n’y fait ? Si votre employeur ne souhaite pas les mettre en place, il ne vous reste plus qu’à plier bagage. Le flex office doit être mise en place avec un minimum d’égard pour les salariés. Si ce n’est pas le cas, c’est qu’il est temps de changer et d’aller voir si l’herbe n’est pas plus verte ailleurs. Mais attention, toutefois, à bien vous renseigner sur les conditions de travail avant de mettre les pieds dans une nouvelle société. Vous pourriez bien vous heurter aux mêmes dysfonctionnements. Alors, prudence !
Flex office : et si la solution était dans la formation pour l’employeur ?
Vous l’avez compris, le flex office ne s’improvise pas. Mal préparé, il peut très vite dériver vers un système très descendant où l’employeur impose et le salarié dispose. La bonne question à se poser serait : pourquoi est-ce au salarié de s’acclimater ? L’entreprise n’aurait-elle pas dû tout faire, au départ, pour susciter son adhésion ? Les bénéfices ne doivent pas être à sens unique. De plus, il y a fort à parier qu’elle n’en tirera plus aucun lorsque tout le monde aura quitté le navire.
La seule solution reste qu’elle se forme à la marque employeur, à la culture d’entreprise, à l’encadrement et à l’animation d’équipe ou encore au Management du changement et de l’innovation. Alors, lancez-vous ! Une chose est certaine : l’ère est à l’écoute des attentes des salariés. Ne revenons pas en arrière. Le flex office a des avantages incontestables. Il suffit de penser humain avant tout.