Trouver un emploi dans une entreprise et le conserver jusqu’à la retraite a longtemps été le rêve des salariés du privé. Mais depuis plusieurs années, les mentalités ont évolué. L’heure est au zapping professionnel, aux carrières ultra-diversifiées et dynamiques !
Certes, avec 15,1 % de turnover en 2018 contre 23 % de moyenne en Europe (étude du cabinet Hay Group) la France est plutôt sage dans le domaine. Mais la tendance ne fait que s’accentuer, tirée notamment par les secteurs des services et des nouvelles technologies. Une récente étude de l’Observatoire des trajectoires professionnelles souligne que l’envie de changer de travail concerne aussi bien les jeunes que les seniors, les moins qualifiés que les plus diplômés, les hommes que les femmes. Le résultat ? A la fin de sa carrière, un français aura occupé en moyenne 4,5 emplois.
Or le turnover coûte cher à l’entreprise, très cher même ! Se séparer d’un employé, c’est accepter de perdre à minima 63 jours de salaire, sans compter de lourds frais administratifs, d’autres liés au recrutement de son remplaçant ainsi que la baisse de rentabilité inévitable en raison de la vacance du poste. Par ailleurs, et même si cette croyance est à prendre avec des pincettes, un turn-over important est souvent assimilé à un mauvais climat social dans l’entreprise. Il faut donc bien savoir interpréter cet indicateur.
Pour bien comprendre ce phénomène, intéressons-nous dans un premier temps au rapport que le salarié français entretient avec son travail et examinons les raisons qui l’incitent à en changer. Passons ensuite en revue les dispositifs mis en place par les entreprises pour recruter de nouveaux talents. L’intérêt des recruteurs pour les Soft Skills mais aussi les traits dominants propres aux nouvelles générations donnent à ce propos des indices très intéressants sur la personnalité des postulants. Enfin, recruter n’est pas conserver ! Voyons donc les quelques méthodes simples qui sont appliquées pour retenir les salariés et leur offrir une qualité de vie dont ils n’auront plus envie de se passer…du moins pour quelques temps !
Les français et leur travail : je t’aime, moi non plus !
Avec un taux de 8,5 % au deuxième trimestre 2019, le chômage dans l’hexagone semble poursuivre une baisse amorcée en 2014. Les statistiques de l’INSEE révèlent que le marché de l’emploi ne s’est jamais aussi bien porté depuis longtemps, toutes classes confondues.
Or si l’accession ou le retour à l’emploi semblent désormais plus faciles, les français eux, en sont de moins en moins satisfaits. Si l’on en croit par exemple une étude de Savills parue en juin 2019, seulement 1 français sur 2 apprécie son bureau !
Le désir de changement touche aujourd’hui toutes les catégories socio-professionnelles, qu’il s’agisse des ouvriers (10 %), des cadres (7 %), mais surtout des salariés en contrat court (47 %) et des intérimaires (65 %).
Malgré l’entrée en vigueur des ruptures conventionnelles avec la Loin° 2008-596 du 25 juin 2008 portant modernisation du marché du travail, 40 % des ruptures de CDI proviennent de démissions sèches. Une des raisons de départ mises en avant le plus souvent est un désaccord avec sa hiérarchie ou ses collègues. En août 2019, 38 500 ruptures ont été validées, un chiffre en constante évolution depuis dix ans !
Alors, ras-le-bol généralisé ou simple tendance typiquement française à râler ? Entrons un peu plus en détail dans les motifs d’insatisfaction les plus souvent cités.
Changer de travail pour travailler mieux : un leitmotiv en France
Quelles sont les racines du changement ?
Interrogés sur ce qui les a incités à changer d’emploi, les français avancent deux raisons principales :
- La première tient dans l’amélioration de leurs conditions de travail ou dans leur volonté de trouver un emploi en adéquation avec leurs contraintes ou aspirations personnelles. Selon un sondage Glassdoor, 87 % des employés attendent de leur employeur qu’il les aide à mieux concilier vie personnelle et vie professionnelle. Il peut s’agir par exemple de trouver un emploi plus proche de leur domicile, d’avoir la possibilité d’aménager leurs horaires, ou tout simplement de travailler dans une meilleure ambiance et avec des moyens plus adaptés. Les relations entre collègues et avec la hiérarchie sont même la préoccupation majeure de la moitié des salariés selon une étude de Malakoff Méderic.
- La deuxième raison, plus matérielle, concerne l’augmentation des revenus. Un français sur 5 souhaite un travail plus stable et craint de perdre son emploi à l’occasion d’une délocalisation ou d’une restructuration. La considération financière prime même sur l’envie de déménager ou le besoin de changer purement et simplement de secteur d’activité.
Il existe bien d’autres raisons encore de partir de l’entreprise. Par exemple, 10 % des salariés estiment faire des choses qu’ils n’approuvent pas pour des raisons déontologiques (6 % des cadres et 17 % des ouvriers non qualifiés). D’autres considèrent leur travail comme inutile. Sur ce point, la création de Bullshit jobs (littéralement « emploi à la con », tâche inutile, vide de sens tels que les définit l’anthropologue David Grabeber dans son livre Bureaucratie) est symptomatique d’une explosion de la bureaucratie et des métiers liés aux fonctions de contrôle, à la création de processus, à la production de formulaires. Et du Bullshit job au Bore-out (épuisement professionnel par l’ennui), il n’y a qu’un pas !
Le travail, un outil sociétal indéniable
Alors qui est concerné au premier chef ? Les plus jeunes ? les seniors ? Globalement, le besoin de changer d’emploi diffère selon l’âge. Pour les Millennials, il s’agit de trouver un travail plus stable (38 %), tandis que leurs aînés (25-49 ans) désirent avant tout travailler dans de meilleures conditions (25 %). Et ce besoin est encore plus significatif parmi nos seniors âgés de 50 ans ou plus (33 %).
Il faut dire que le travail remplit aujourd’hui une fonction identificatoire forte. C’est à travers lui que le salarié se construit. Il est indissociable d’une part de la notion d’utilité. L’utilité pour soi-même évidemment, par le fait de gagner de l’argent pour subvenir à ses besoins et faire vivre sa famille. L’utilité pour l’entreprise ensuite, voire même pour la société, par le fait de fournir un service, de participer à une cause.
Le travail est également lié à la notion de reconnaissance. Et c’est probablement là que le bât blesse le plus les français interrogés dans le cadre d’un travail mené en novembre 2018 pour le compte de la Fondation Jean Jaurès. Pour pratiquement un salarié sur 2, leur travail n’est pas reconnu à sa juste valeur par la hiérarchie. Et c’est en France que le manque de reconnaissance est le plus marquant parmi tous les pays européens.
Le développement du numérique accélère la transformation du travail
Par ailleurs, le développement exponentiel du numérique et des réseaux fait qu’aujourd’hui, il est possible de faire le même travail qu’au bureau, mais depuis chez soi ou de beaucoup plus loin encore. Le télétravail, dont les atouts ont été vantés depuis longtemps et devant de très hautes instances (au cours du G7 de 1995 par exemple) est aujourd’hui parfaitement encadré et réglementé. Il démontre d’ailleurs son efficacité : 3 personnes interrogées sur 4 s’estiment plus productives en télétravail qu’en présentiel.
Enfin, comme on le sait, la plupart des métiers de demain n’existent pas encore. On estime que 85 % des emplois de 2030 sont encore inconnus à l’heure actuelle tandis qu’une grande majorité des métiers actuels disparaîtront à la faveur du développement de l’intelligence artificielle et de la robotisation de certaines fonctions chronophages. Rien d’étonnant donc, à ce que les salariés se préparent déjà à en changer car ils savent que d’une manière ou d’une autre, ils n’auront pas le choix !
Terminons par une idée reçue. En matière de changement, les Switchers (ceux qui quittent leur travail pour un autre radicalement différent) ne sont pas si nombreux, même s’ils sont souvent médiatisés. Passer de la holding internationale à l’élevage de chèvres n’est courant ! En réalité, la plupart des gens changent pour un emploi relativement proche. Parfois, c’est l’ambiance de leur bureau qui les pousse à partir, d’autres fois c’est pour exercer le même métier en freelance. Quoi qu’il en soit, changer n’est pas à la portée de tous. Seulement 40 % des salariés s’en donnent vraiment les moyens. Car la reconversion professionnelle demande un investissement sensible en termes de temps mais également de finances, qui s’ajoute à des journées de travail souvent bien chargées.
Des salariés insatisfaits qui ont la bougeotte, voilà qui ne fait pas vraiment l’affaire des DRH d’entreprise, contraints d’ajuster leurs méthodes pour mieux trouver la perle rare…
Quand la société se transforme, les recruteurs s’adaptent.
Le recrutement est un (gros !) pari sur l’avenir
L’importance actuelle du turn-over ne laisse pas le choix à l’entreprise que de fournir un plus gros effort de recrutement. Or, on le sait, ce processus se révèle aussi chronophage qu’onéreux lorsqu’il est mal maîtrisé. Le coût du recrutement et du processus d’onboarding (processus d’intégration dans l’entreprise de la personne qui vient d’être recrutée) est estimé à environ 25% du salaire brut de la personne embauchée. C’est la raison pour laquelle les recruteurs réfléchissent à deux fois sur la manière de sélectionner les postulants.
Par ailleurs, il devient très difficile de dénicher au bon moment celui qui détient la compétence recherchée et qui saura s’adapter sans trop d’efforts à la culture de l’entreprise. Et ce n’est pas seulement le cas pour les postes à hautes responsabilités. Il est très difficile aussi de mettre la main sur certaines compétences bien particulières par exemple dans le domaine des nouvelles technologies, tellement les ressources sont prisées.
Les recruteurs savent qu’ils doivent anticiper, connaître précisément leurs besoins, établir des processus de recrutement pertinents et robustes, mais également bien cibler leurs canaux de communication. Sur ce dernier point, une étude de l’APEC réalisée en 2018 montre qu’ils utilisent jusqu’à cinq canaux simultanés afin d’optimiser leurs chances.
Et s’ils font encore majoritairement appel à la publication des offres d’emploi (88 %) via des médias spécialisés, ils consultent également les candidatures spontanées (61 %) et surtout les réseaux sociaux. D’ailleurs, ils auraient bien tort de se priver d’une telle source de renseignements car les profils des postulants contiennent généralement des informations essentielles qu’ils ne leurs auraient probablement pas données ! En France, c’est LinkedIn qui est préféré en tant que réseau professionnel, devant Twitter et Facebook.
Les dangers du « Disgrâcebook » ou le meilleur moyen pour que votre futur employeur voit ce que vous ne vouliez pas lui montrer : soigner son image sur le web est devenu primordial pour rester employable.
Source : statista.com
Eh oui, recruter, c’est avant tout séduire !
Cependant, qu’on ne s’y trompe pas, la base d’un bon recrutement passe tout de même par la vérification des références des postulants (authenticité des diplômes, des références et recommandations). Affabulateurs s’abstenir ! Le problème c’est qu’aujourd’hui, certains profils se font rares. Le monde du web, par exemple, connait une pénurie de talents. Il faut donc savoir les attirer, ou plutôt les séduire ! Et à ce jeu-là, le seul nom de la marque ne suffit malheureusement plus.
L’entreprise doit « marketer » ses offres comme elle le fait avec ses produits. Il y a plusieurs avantages à cela. D’abord la curiosité du postulant sera piquée au vif et il sera plus enclin à aller au bout du processus de recrutement. Rappelons qu’aujourd’hui, les multiples étapes que représentent l’envoi d’un curriculum vitae, un éventuel pré-entretien téléphonique suivi d’une litanie d’autres en face-à-face ont de quoi décourager les plus motivés.
Même les géants du Web de la Silicon Valley ont dû revoir leurs méthodes de recrutement face à l’afflux de Millennials, qui représenteront par exemple en France, près de la moitié des actifs dès l’année prochaine.
Le deuxième avantage est d’attirer d’autres candidatures parce que le postulant aura parlé des méthodes originales pratiquées par l’entreprise. Qui ne serait pas tenté par un Escape Game pour démontrer ses capacités de manager, plutôt que de subir un jeu de questions-réponses classique dans le bureau austère d’un DRH ?
Enfin, l’entreprise se fait connaître parmi ses pairs comme étant capable d’innover, de s’adapter à la société dans laquelle elle veut dénicher ses futurs collaborateurs. Alors aujourd’hui, fini le bon vieux test psychotechnique ou l’analyse graphologique. Place aux méthodes innovantes ! (pour vous aider : formation définir et mettre en œuvre une stratégie de recrutement digital)
Il faut savoir se faire plaisir, surtout en recrutant
De nombreuses entreprises font appel aux nouvelles technologies jusque dans leurs processus de recrutement. Chez Ubisoft, on peut visiter son futur bureau grâce à la réalité virtuelle, tandis qu’Accenture propose de participer à un Escape Game digital en utilisant des Smart Glasses !
D’autres entreprises ont misé sur la délocalisation de leur recrutement dans les lieux plutôt originaux. Il n’est donc pas rare de côtoyer ses futurs supérieurs hiérarchiques lors d’une partie de Laser Game (Loyen&Loeff), d’une soirée cinéma (Seekube), ou bien sur un parcours de Run and Bike (Carrefour).
Enfin, c’est souvent le collectif qui est mis en avant. Les entreprises n’hésitent pas à convoquer des candidats qu’elles supposent compétents dans divers domaines. Le but n’est plus de les mettre en concurrence, mais plutôt de les mettre ensemble face à un défi, le temps d’une soirée par exemple (Wizbii ci-dessous).
On peut aller très loin dans l’originalité. Vera, par exemple, une recruteuse virtuelle développée par la start-up Stafory, est capable de mener des milliers d’entretiens en une journée, sans perdre patience et en toute impartialité ! Qu’on se rassure, elle n’effectue en fait qu’un premier filtre parmi les postulants et n’émet qu’un avis au profit d’un recruteur, bien humain celui-ci !
On l’aura compris, l’important reste de capter le bon candidat avec la bonne méthode. Encore faut-il bien connaître le postulant, quitte à aller chercher bien au-delà du CV…
Les compétences comportementales d’un individu sont sa réelle valeur ajoutée.
Pour recruter, il faut d’abord partir sur de bonnes bases…
Le premier outil de recrutement apparaît clairement dans le curriculum vitae. Il s’agit des Hard Skills, c’est-à-dire de l’ensemble des diplômes détenus et des savoir-faire acquis au cours d’une formation académique et d’une expérience professionnelle. En France, on accorde encore une très grande importance au niveau de qualification, qui permet en général de justifier les bases de la rémunération d’un employé.
Donc, jusqu’à maintenant, pour réussir son embauche, mieux valait avoir les bons diplômes et le background adéquat. Si bien que les profils atypiques préféraient mettre un mouchoir sur leurs traits de caractère pour conserver leurs chances.
Or ce dogme laisse peu à peu la place aux compétences comportementales, autrement appelées Soft Skills. Elles définissent le savoir-être de l’individu, ses qualités intrinsèques. En effet, à quoi bon recruter l’employé parfait, celui qui connaît parfaitement le job, qui a toutes les compétences, si in fine, il se révèle peu collaboratif, déloyal, manquant d’initiative… ?
Une récente enquête de RegionJob lève même le voile sur un tabou : le savoir-être du candidat arrive en tête des préoccupations lorsque le recrutement s’avère difficile et la personnalité du postulant fait toute la différence entre deux profils similaires, bien avant leurs expériences respectives.
…et chercher ce qu’il y a de meilleur au plus profond de l’individu
Qu’on se rassure, tout le monde dispose de Soft Skills, mais elles sont plus ou moins développées dans certains domaines, selon les individus. Les plus recherchées sont traditionnellement celles qui favorisent le travail de groupe (savoir gérer des équipes, savoir négocier) ou la résilience (résolution de problèmes complexes, prise de décision).
Le gros problème des Soft Skills, c’est qu’elles sont difficiles à mettre en avant sur un curriculum vitae et surtout qu’elles sont difficiles à déceler, sauf à disposer de techniques de recrutement adaptées. Mais les recruteurs maîtrisent aujourd’hui de plus en plus les outils appropriés.
Prenons l’exemple d’une des méthodes utilisées couramment : le test MBTI. Celui-ci agit comme un révélateur d’intensité de la personnalité selon quatre axes, permettant ainsi de dégager 16 profils différents, pas moins !
On peut croire ou non dans les résultats de ce genre de tests mais force est de constater qu’en recoupant plusieurs méthodes similaires, on arrive souvent au même résultat (si tant est qu’on se soit donné la peine d’être objectif en répondant aux questions !). Cela démontre que chaque personnalité dispose de marqueurs prononcés dans certains domaines et qu’ils resteront à peu près les mêmes durant la carrière. Inutile donc de vouloir tricher et de se faire passer pour celui que l’on n’est pas car le naturel reviendra toujours au galop…
Paradoxalement, certaines entreprises recherchent même des candidats qui ne sont pas de bons petits soldats, mais qui au contraire savent remettre en cause leurs processus. Ces empêcheurs de tourner en rond à la critique facile ne sont en général pas recrutés par CV et entretien mais plutôt par cooptation ou hackathon (Intel a testé ce procédé dès 2015).
Notons que c’est principalement la digitalisation du monde du travail qui rend possible l’appel aux profils atypiques qui sont capables non seulement de s’adapter rapidement à un monde professionnel en constante mutation, mais également d’apporter une plus-value unique. Qu’on se le dise : les Soft Skills sont désormais incontournables !
Finalement, mieux vaut se montrer naturel et profiter d’un trait de caractère qui fera toute la différence. Les DRH ne recherchent pas des clones mais des pépites. Et ça tombe bien parce que question changements, depuis deux décennies, nous sommes plutôt gâtés !
X, Y et désormais Z, les générations se suivent mais ne se ressemblent pas.
La transformation de l’emploi, c’est d’abord celle de la société
Les recruteurs actuels savent qu’ils auront de plus en plus souvent à faire à des candidats dont les profils sont divergents. Au sein même de l’entreprise cohabitent déjà des collaborateurs dont le rapport au travail a suivi une inexorable évolution sociétale. Il reste encore une part non négligeable de baby-boomers, mais ceux-ci laissent progressivement la place aux générations X, Y et bientôt Z.
Pourquoi trois générations successives sont-elles si distinctes ? Pour le comprendre, il faut mettre en regard l’évolution de la société et des mentalités avec celle des nouvelles technologies. Car cette dernière n’a pas seulement transformé notre quotidien. Elle a également bouleversé le monde du travail et ses codes. Et pour éviter que de telles différences de comportement ou de perception ne mènent au conflit générationnel au sein de l’entreprise, voire du bureau, il faut savoir satisfaire tout le monde. Il en va de la performance même de la structure. Un réel management intergénérationnel est nécessaire et des formations existent pour mieux appréhender des défis tels que l’arrivée massive du digital dans l’entreprise (pour vous aider : formation management à l’ère du digital).
Mais au fait, comment ces différentes générations se définissent-elles ? Et surtout, quels sont leurs principaux traits comportementaux dans le monde du travail ?
Une génération peut en cacher une autre
La génération X est née entre le milieu des années 1960 et le début des années 1980. Elle a connu la mise en place d’Internet, mais de manière très progressive. Rappelons que la « toile » s’est d’abord tissée aux Etats-Unis à partir de 1969, avant d’atteindre l’Europe aux alentours de 1985. Les « GenXers » savent qu’il existe un monde sans Internet, et pour cause ! Ils l’ont connu pour la plupart dans leur premier emploi.
Il n’est donc pas étonnant que cette génération soit un peu « techno exclue » et moins communicante que les suivantes. En contrepartie, on y trouve des employés qui présentent un fort attachement à l’entreprise ainsi qu’à ses valeurs. Le « GenXer » s’accoutume bien d’une hiérarchie pyramidale dans laquelle il gravit des échelons en faisant ses preuves.
Pour un employé de la génération X, le travail est primordial et le chômage doit être évité coûte que coûte, quitte à conserver un emploi inconfortable et peu épanouissant.
La génération suivante est née avec Internet, entre le début des années 1980 et l’an 2000. Elle entretient un rapport totalement différent avec l’entreprise dont elle ne reconnait pas l’autorité. Le « GenYer » est beaucoup plus égocentrique que ses parents. Il est arrivé sur le marché du travail en pleine crise économique, à tel point que la génération Y est dite « génération sacrifiée ». Pour le Millennial, comme on le qualifie également, le travail n’est pas au centre des préoccupations. C’est un adepte du donnant-donnant et à la moindre contrariété qui nuit à sa qualité de vie, il est prêt à changer de travail, de région, voire de pays pour trouver mieux.
La génération Y présente une appétence particulière pour les outils de communication qu’elle sait particulièrement bien manier. De fait, elle est beaucoup plus communicante que la précédente. Il existe d’ailleurs quelques astuces pour recruter un millennial…
La génération Z, quant à elle, arrive à peine dans la vie active. Elle n’est pas née avec Internet mais plutôt dans Internet. C’est une génération hyper connectée qui mise beaucoup plus sur les réseaux sociaux que sur les études pour se faire une place. L’international ne lui fait pas peur et plus de 70 % des « GenZers » sont prêts à partir à l’étranger.
Plutôt originale et innovante, cette génération entretient une défiance vis-à-vis de l’entreprise et préfère entreprendre que dépendre. Son leitmotiv ? La vie doit être fluide et apporter du bien-être. Et elle devrait en avoir bientôt car le départ massif de baby-boomers à la retraite lui ouvrira grandes les portes de la vie active.
Pas facile donc, d’y voir clair entre les aspirations du postulant, sa personnalité et ses influences générationnelles. Et quand le recrutement aboutit, la partie n’est pas terminée pour autant, loin de là !
Recruter oui, on sait faire ! Mais après ?
Le recrutement permet de faire entrer quelqu’un dans l’entreprise. Mais pour éviter qu’il fasse demi-tour à plus ou moins long terme, encore faut-il lui donner l’envie d’y rester.
Aujourd’hui, 2 entreprises sur 3 ne disposent pas de réel processus d’intégration. Pas étonnant alors que 20 % des petits nouveaux envisagent de quitter l’entreprise…dès le premier jour (étude Mercuri Urvall) ! Avec un turn-over estimé aux alentours de 15 % en 2018, les entreprises françaises savent ce que coûte un départ en termes de productivité et surtout d’image !
Pour un employé, se sentir bien c’est d’abord trouver au quotidien de bonnes conditions pour réaliser son travail. Cela passe par une bonne ambiance de travail, l’adhésion aux valeurs que véhicule l’entreprise ou encore la reconnaissance de ses efforts par les différents échelons hiérarchiques. Une étude montre que 75 % des français désirent changer d’entreprise pour quitter leur manager plutôt que leur travail.
D’autres principes sont également plébiscités : une rémunération adaptée et évolutive en fonction des performances, une offre de formation adaptée à l’emploi ou encore la flexibilité des horaires. Les pistes sont nombreuses.
Et pour évaluer le niveau de satisfaction d’un salarié dans ces domaines, le mieux reste encore de disposer d’indicateurs judicieusement choisis, qu’un système d’information orienté RH permettra de synthétiser au profit des dirigeants pour qu’ils puissent rapidement orienter leurs efforts.
Certains n’hésitent d’ailleurs pas à considérer leurs employés de la même manière que leurs clients. Après tout, chaque salarié est un véritable ambassadeur. Sur la plupart des pages web des entreprises on peut lire les commentaires de ceux qui y travaillent, et qui sont à priori les mieux placés pour en parler. A contrario, un employé insatisfait peut rapidement faire chuter la notoriété de son employeur, surtout si les deux se sont quittés fâchés ! L’entreprise doit être une oasis, pas un mirage…(pour vous aider : formation e-reputation, corporate et personal branding)
La qualité de vie au travail, désormais élevée au rang d’exigence !
Le travail est un composant du bien-être individuel
La plupart des gens désirent s’investir dans leur travail car ils l’ont érigé au rang de valeur essentielle. En effet, sans travail, il n’y a pas d’intégration dans un groupe, et cela peut mener à un sentiment d’exclusion sociale.
Et si plus de 60 % des français sont insatisfaits de leur emploi, c’est justement parce que la différence entre un travail idéalisé et la réalité de celui que l’on pratique génère un sentiment de frustration.
Plus que le plan de carrière, c’est la qualité de vie qui attire désormais le postulant à un poste. Et contre toute attente, ce sont les freelance et les intérimaires qualifiés qui se sentent mieux au travail que les détenteurs d’un CDI ou même les fonctionnaires ! En bref, aujourd’hui, il fait meilleur vivre dans une TPE de 10 salariés que dans une grande administration…
Le travail est perçu non plus comme une finalité mais plutôt comme un instrument de vie. Améliorer les conditions dans lesquelles on le pratique, c’est améliorer par la même son existence, sa santé, sa longévité. Car l’entreprise a beaucoup à perdre de l’insatisfaction de ses employés. Qu’il s’agisse de stress, de turn-over, de harcèlement, d’absence de reconnaissance, voire de burn-out, c’est à la fois l’individu et sa structure qui payent les pots cassés. Le coût de la baisse de performance des entreprises est estimé à plusieurs milliards d’euros.
La QVT, c’est aussi l’affaire de tous
Alors qui doit agir ? L’Accord national interprofessionnel signé le 19 juin 2013, peu de temps après la vague dramatique de suicides chez France Telecom, donne quelques pistes. Il souligne que la santé et la qualité de vie au travail (QVT) sont les leviers de la performance d’une entreprise. Et pour ce faire, tout le monde est impliqué. Aussi bien le salarié lui-même que les dirigeants et les partenaires sociaux.
Chaque individu doit pouvoir atteindre un équilibre entre vie personnelle et vie professionnelle, mais également devenir un vecteur de bien-être au travail en entretenant de bonnes relations avec ses collaborateurs, en maintenant un niveau acceptable de cohésion, ou encore en acceptant par exemple de nouvelles responsabilités.
L’employeur, de son côté, se doit de prendre les mesures jugées nécessaires à la protection de la santé mentale et physique des travailleurs (pour vous aider : la formation communication interpersonnelle). Il doit mettre en place une démarche QVT dans son établissement. On estime qu’un simple euro investi dans la prévention permet une économie de 13 euros sur la facture des soins !
Aujourd’hui, 80 % des dirigeants ont bien conscience de leur responsabilité dans le domaine, même si 61 % de leurs employés sont plutôt insatisfaits des actions menées à leur profit. Il faut dire que pour 3 employés sur 4, c’est d’abord à l’entreprise qui les accueille d’améliorer leur QVT.
Et les partenaires sociaux ? Ils ont un rôle essentiel lors des négociations annuelles obligatoires, revisitées depuis la Loi Rebsamen de 2015, et qui comprennent désormais trois volets dont un lié essentiellement à la QVT en traitant de sujets tels que l’égalité hommes/femmes, la pénibilité, le droit d’expression, le handicap…
N’attendez pas qu’il soit trop tard pour agir !
La QVT, rappelons-le, n’est pas un caprice et les risques d’atteinte à l’intégrité physique ou psychique d’un individu sont avérés, surtout dans un monde du travail qui demeure fortement anxiogène en raison des enjeux économiques actuels.
Le stress est une menace permanente à ne pas négliger, et qui joue sur deux tableaux. D’abord la santé physique de l’individu puisqu’on le sait par exemple responsable d’une grande majorité des troubles musculosquelettiques (TMS). Puis sur la santé psychique avec des conséquences telles qu’insomnies, anxiété, dépression…
Un français sur 5 pense avoir déjà été victime d’un burn-out. En France mais également en Europe, il s’agit actuellement de la première cause d’arrêts maladie. La moitié des salariés présentent un taux élevé d’anxiété et un tiers ont atteint un niveau proche de la dépression. Le stress et ses conséquences peuvent en outre être difficiles à percevoir car la maladie, quelle qu’elle soit, reste un facteur d’exclusion. Il est donc fréquent que des salariés cessent leur traitement pour revenir au travail ou parce que les conséquences de ce traitement sont visibles (fatigue, baisse de concentration…).
Alors quels remèdes une entreprise peut-elle appliquer pour garantir un standard de qualité de vie ? Les éléments de réponse sont nombreux, y compris de la part d’instances telles que l’ANACT ou de la Haute autorité de santé, preuve que le sujet est pris en considération au plus haut niveau de l’État.
Retenons simplement que la première étape consiste à élaborer un diagnostic de la structure en s’intéressant particulièrement à des marqueurs tels que l’environnement physique et social, l’utilisation des compétences internes, les revenus ou encore les perspectives d’avenir.
L’entreprise doit agir à la fois sur :
- La santé et les conditions de travail : veiller à mettre le matériel nécessaire à disposition, prendre en compte l’aspect émotionnel de certaines tâches, élaborer une politique de prévention des risques.
- Le management : organiser le temps de travail, promouvoir un management bienveillant ou encore permettre des évolutions de carrière et de salaire.
- La communication : ne pas hésiter à valoriser ses collaborateurs, décloisonner le travail et utiliser les réseaux sociaux.
Et sans une vraie culture d’entreprise pour pérenniser ces mesures, il n’y aura pas de résultat durable. Il s’agit donc d’impliquer tous les salariés. Les dirigeants en sont conscients et 3 sur 4 estiment que la QVT est leur préoccupation majeure.
En conclusion.
Postuler, recruter, accompagner, fidéliser et puis…recommencer ! Ainsi va le cycle de l’emploi car désormais, conserver sa place n’est plus une fin en soi. Être bien au travail en est une. D’où l’adaptation aussi nécessaire qu’indispensable des entreprises. L’ascension dans la hiérarchie a laissé place à la quête de sens du travail effectué. Les horaires fixes ont été supplantés par un besoin d’autonomie et de contrôle de la part des employés. On veut être mieux pour mieux travailler.
Ce n’est pas une spécificité française. Ce phénomène générationnel et culturel ne connait pas de frontières et laisse les entreprises face à un vrai défi. L’heure est à la disruption digitale, un passage indispensable à l’ère du numérique qui risque de laisser pas mal d’entre elles sur le bord de la route. Inutile alors d’être devin pour savoir ce qui attend les nouvelles générations en quête d’emploi. Et à l’instar des évolutions anthropologies, ce seront probablement les plus agiles qui s’en sortiront le mieux !