Emploi

Chasseurs de têtes : les réseaux sociaux, outils ou concurrents ?

chasseur de tete enjeux du numérique

Avec les nouvelles technologies et l’avènement des réseaux sociaux, on aurait pu croire à la fin du règne des chasseurs de têtes. Il n’en est rien. La chasse aux talents persiste et signe. Selon une étude d’OasYs Consultants de 2018, « Environ un quart du recrutement des cadres passe par l’intermédiaire de Chasseurs de têtes et de cabinets de recrutement« . Qui plus est, les médias sociaux sont même devenus leurs sources privilégiées pour dénicher des compétences. Quelles sont les nouvelles pratiques à l’ère du tout digital ? Comment les chasseurs de tête doivent réinventer leur métier ? On fait le point.

Les nouvelles technologies comme alliées

Il était tentant de penser que les nouvelles technologies, capables de croiser des millions de données sur les entreprises et leurs dirigeants, allaient sonner le glas du métier de Chasseur de têtes. Pourtant, loin d’être devenus les ennemis des cabinets de recrutement, les nouvelles technologies sont aujourd’hui leur principal allié.

L’appui des réseaux sociaux

Le digital a transformé, dès son apparition, la recherche de talents. Dès les années 2010, c’est la fin des petites annonces et des tris de CVs envoyés par courrier. L’étude OasYs Consultant confirme qu’en 2018 : « le recensement des candidats par publication d’annonces web ou presse écrite continue à décroitre (moins 10 points par rapport à 2014). » Le Chasseur de têtes peut désormais procéder par recherches par mots-clés, par sollicitations de communautés. Les réseaux sociaux sont devenus les outils privilégiés du recrutement. D’ailleurs, il est à noter qu’un candidat qui ne serait pas visible sur les réseaux professionnels serait considéré comme suspect par l’ensemble du secteur des ressources humaines. En 2018, selon OasYs Consultants, la source privilégiée des Chasseurs de têtes pour l’identification de leurs candidats n’était autre que les réseaux sociaux en ligne (94% en 2018, et déjà 90% en 90 % en 2014 et 81% en 2011). 

Dans l’ensemble, nous dit l’étude, les réseaux sociaux sont de plus en plus exploités par les Chasseurs de têtes pour identifier, mais également pour contacter les candidats et s’informer sur leur profil. C’est LinkedIn qui reste de très loin le média préféré des professionnels du recrutement. « Il est utilisé par 98% des consultants ». En revanche, il est à noter que « Tweets, Facebook et blogs ne percent pas auprès des chasseurs comme sources d’informations utiles. » De même, Viadeo, l’équivalent français de LinkedIn, ne semble rencontrer aucun succès ou presque pour la recherche de talents des recruteurs. 

La Chasse à l’international

Même combat dans le reste du monde occidental, les réseaux sociaux ont la cote et les recruteurs en font un de leurs principaux appuis. D’ailleurs, certains pays vont plus loin que le France et passent en plus par les réseaux sociaux personnels comme Facebook pour dénicher des candidats. OasYs le confirme dans son étude : « Si aujourd’hui Facebook est peu utilisé en France par les recruteurs, il devient un acteur incontournable, notamment aux États-Unis, auprès des Start-up et des milieux entrepreneurs américains. » En général, il est largement conseillé de maintenir un profil Facebook à jour et dénué de photos compromettantes, d’autant plus si l’on est en recherche active de travail. En effet, si Facebook est utilisé outre-Atlantique pour dénicher les talents, il peut parfois être consulté par le chasseur de têtes français pour double checker un profil.

Big datas et ATS

En dehors des réseaux sociaux, les nouvelles technologies ont le vent en poupe dans les cabinets de Chasse. Les big datas, notamment, font une entrée fracassante au service de la profession. Une large majorité des chasseurs interrogés par OasYs (72%) reconnait en effet l’impact des mégadonnées sur le mode opératoire et particulièrement le sourcing des candidats. Et lorsqu’OasYs s’intéresse aux cabinets spécialisés dans les dirigeants et les cabinets de taille mondiale, les chiffres grimpent encore. 100% des interrogés avouent en effet s’y intéresser de très près et déclarent investir largement sur le sujet. 

Et les big datas sont partout ! Les fameux jobboards par exemple (Monster, Cadremploi, Apec…), auxquels sont régulièrement envoyés des millions de CVs, représentent une bibliothèque infinie de données pour les recruteurs. De même, comme l’explique Thibaud Chalmin, chasseur de têtes chez Elysées Consultants, dans une interview donnée à Reflets (revue de l’Esses Alumni Association) : « Nous avons également un annuaire cumulé de tous les anciens des grandes écoles ainsi que des principaux troisièmes cycles universitaires : 1,2 millions de cadres.« 

Source Image : rhizome-recrutement

Autre pratique bien utilisée, les ATS (Applicant Tracking Systems), un logiciel qui permet d’aider au processus de recrutement de bout en bout.

Un ATS peut en effet :

  • récolter les CV 
  • poster des annonces 
  • récolter les candidatures spontanées
  • traiter et gérer les candidatures
  • diffuser une annonce 
  • suivre le processus de recrutement et l’avancement du candidat
  • identifier des profils et entretenir un vivier 
  • organiser les entretiens vidéos
  • partager des profils entre recruteurs 

Toujours selon l’étude citée « Outre la grande facilité pour publier une offre rapidement et à moindre coût, les ATS permettent de sélectionner les candidatures par matching de mots clés, et de fait s’avèrent particulièrement appréciables pour présélectionner les bons dossiers.« 

Un métier humain

Les Chasseurs ont donc réussi à s’approprier les réseaux sociaux, ainsi que les nouvelles technologies et les données digitales en général, et loin de devenir des concurrents, ceux-ci sont désormais d’indispensables outils. On est donc encore à mille lieux de la machine qui détrône l’employé, et la Chasse de têtes demeure un métier d’humains.

Dans un article du cabinet de Chasse ALSpective, Albert Hiribarrondo, fondateur du groupe, écrit : « La Chasse de têtes reste un art exercé par des consultants expérimentés, pour motiver des talents audacieux à venir inventer des futurs possibles dans une autre entreprise. (…) Autant qu’une science ouverte aux nouvelles technologies, la Chasse de têtes reste un art qui touche à l’humain. Son avenir est d’autant plus assuré que la société réservera aux Femmes/Hommes, la place qui leur revient face aux robots : celle de diriger. »

chasseur de tete, tout un art
Source : Manpower

Le sourcing traditionnel demeure

Malgré l’explosion d’internet et l’apport indéniable des réseaux sociaux, les cabinets de recrutements ne se passent pas pour autant des méthodes traditionnelles. Pour sourcer leurs candidats, les chasseurs utilisent en effet :

  • Leur réseau personnel pour 87% d’entre eux
  • L’approche directe auprès des concurrents pour 74% d’entre eux

Appréhender les soft-skills

Certes les big datas, réseaux sociaux et autres programmes d’aide à la chasse sont nécessaires à un bon cabinet de recrutement, mais seul l’humain peut vraiment identifier les valeurs nécessaires à une entreprise. D’après OasYs, au sujet des big datas : « Si tous (les chasseurs interrogés) soulignent le gain de temps et l’efficacité dans le sourcing, tous s’accordent pour affirmer que « l’œil » du chasseur demeure le plus important et notamment pour appréhender les soft-skills : véritable valeur ajoutée d’un professionnel. » De même, qui d’autre qu’un humain pourra analyser la communication verbale et non-verbale d’un candidat ?

Appréhender des besoins

La chasse de têtes, c’est enfin un métier qui « inclut l’art d’appréhender aussi du non-quantifiable », dit Albert Hiribarrondo. Le fondateur d’ALSpectiveajoute : « Loin du passé, c’est aux « frontières du futur » que se situe l’art du consultant-conseiller de chasse : définir le sens du besoin stratégique de long terme qui se cache derrière une fiche de poste à pourvoir et qui impactera sur la vie du futur recruté ; pousser le client « à la limite » en dehors de sa zone de confort visant à se rassurer en allant trouver une reproduction du passé (alors que le successeur ne sera jamais comme le partant) ; avoir l’audace d’aller chercher des profils à potentiel (et non ayant réussi à une autre époque); et savoir convaincre les meilleurs talents de rejoindre une entreprise à laquelle ils n’avaient pas pensé. La chasse de têtes devient l’art d’inventer, avec des profils en devenir, des futurs possibles pour l’entreprise. »

L’approche directe recommandée

Tout comme les chasseurs de têtes utilisent les réseaux professionnels pour identifier des potentiels talents, certains candidats utilisent Linkedin pour entrer en relation avec des cabinets de recrutement. Il est à noter que les chasseurs, et autres recruteurs, ne trouvent pas cela suffisants, d’autant moins si votre invitation à se connecter n’est pas personnalisée. Les recommandations des professionnels sont ainsi de favoriser les démarches directes et les relations humaines et de ne pas remplacer l’envoi d’un mail personnalisé et d’un CV par une simple demande de contact.

Se former

Comme l’ensemble des métiers qui se frottent au digital, la Chasse de têtes évolue rapidement. Il est donc primordial de rester à jour en ce qui concerne les nouvelles technologies, les réseaux sociaux…etc. C’est pourquoi Visiplus propose deux formations dans ce sens, intitulées Management des ressources humaines à l’ère du digital et Recruter grâce aux réseaux sociaux.

La première permettra d’acquérir les nouvelles compétences nécessaires à la transformation digitale de la fonction, la seconde se concentre sur les réseaux sociaux comme moyen de communication RH performant, et la meilleure façon pour trouver facilement des candidats via LinkedIn.

Internet a donc bouleversé le marché de l’emploi et les pratiques de ses acteurs. Pour autant, il semble que le recrutement ne soit pas encore prêt à se résumer à des chiffres, des mots clés et des hashtags. Le dernier mot revient à Patrick de Brossia co-auteur de Développer sa visibilité sur internet pour trouver un emploi : « Nous sommes à l’ère de l’intelligence artificielle ! (…) Y-aura-t-il déshumanisation ? La mise à l’honneur des soft skills laisse présager un équilibre plus harmonieux, plus humain. (…) C’est probablement la relation humaine qui aura le dernier mot ! 

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