Des pratiques bouleversées par la crise, mais qui semblent durables
Où en sont les actifs français en matière de formation professionnelle ? E-learning, individualisation de l’accès à la formation : les pratiques ont évolué avec la crise. Toutefois, certaines tendances observées précédemment se confirment. C’est du moins ce que révèle le baromètre VISIPLUS academy et BVA. Pour la 3ᵉ année consécutive, celui-ci s’intéresse au sujet. En effet, cette enquête, réalisée du 13 au 18 janvier 2022, dresse un bilan de l’évolution de l’accès à la formation et de la motivation des actifs à se former. L’occasion également de faire le point sur leur niveau d’information par rapport aux dispositifs dédiés. Une chose est sûre : la formation n’a pas fini de les séduire et ils s’imposent désormais comme de véritables acteurs de leur évolution professionnelle. La réforme de la formation professionnelle commencerait-elle à porter ses fruits ?
Formation professionnelle : l’impact de la crise sur les pratiques des Français
VISIPLUS academy et le Groupe BVA viennent de dévoiler les résultats de leur 3ᵉ baromètre sur la formation professionnelle. Alors que la pandémie se poursuit et que la crise a bouleversé les usages en matière de développement des compétences, quelles conclusions pouvons-nous en tirer ? Zoom sur un paysage qui retrouve aujourd’hui une certaine stabilité tout en intégrant les changements.
Le recours à la formation depuis la crise : des changements durables
Il est des secteurs, comme celui de la formation professionnelle, pour lesquels il y a bien un « avant » et un « après » crise. En effet, avant la crise sanitaire, 38 % des actifs avaient suivi au moins une formation. En 2021, 3 actifs sur 10 ont suivi au moins une formation, soit 31 %. Un chiffre légèrement plus élevé que celui de 2020 (29 %). Par contre, le recours à la formation a été plus important pour les plus jeunes (42 % des 18-24 ans) et les CSP+ (43 % des cadres). Les plus âgés ont été, quant à eux, moins concernés (seuls 21 % des 50 ans et plus ont suivi au moins une formation au cours des 12 derniers mois) tout comme les ouvriers (18 %).
Le digital gagne du terrain dans la formation professionnelle des actifs français
Les formations en présentiel sont restées dans les usages, cette année, pour la moitié des actifs (49 %). Toutefois, le digital, après une forte augmentation en 2020, s’est installé comme une pratique durable. De fait, la crise sanitaire a fortement boosté le recours aux formations à distance et hybrides. Une tendance éphémère liée à la distanciation ? Pas du tout, puisque celle-ci s’est maintenue en 2021 (34 % à distance et 17 % en mixtes) et plus particulièrement chez les cadres. Ils sont donc 51 % à plébisciter le digital learning.
Les Français véritables acteurs de leur évolution professionnelle
6 actifs sur 10 ont été à l’initiative de leur formation en 2021. Un chiffre en augmentation de 8 % par rapport à l’année 2020. Une hausse qui confirme la tendance à l’individualisation de l’accès a la formation. Certains secteurs ont été davantage concernés comme l’administration publique, l’enseignement, la santé humaine et l’action sociale (69 %). À l’inverse, l’employeur est resté à l’initiative de cette décision pour 1 actif sur 2. Ceci principalement pour les salariés du privé (57 %). À noter, également qu’ils sont un peu plus nombreux à avoir pris l’initiative de manière conjointe (12 %, soit +4 pts par rapport à 2021). Rappelons que la co-construction de la formation professionnelle fait partie des enjeux de la loi du 5 septembre 2018. Les effets de la réforme de la formation professionnelle sont donc bien là.
Pourquoi les Français ont-ils eu recours à la formation professionnelle en 2021… ou pas ?
Mais quelles sont les motivations des actifs à se former ? Lorsqu’ils étaient à l’initiative de leur formation, ces derniers ont affirmé, avant tout, vouloir développer leurs compétences (62 %) ou s’adapter aux évolutions de leur métier (50 % au global et 63 % les cadres). Toutefois, par rapport à 2020, ces motivations se sont atténuées. L’objectif de trouver un emploi (13 %) ou de créer leur entreprise (10 %) s’est en revanche sensiblement affirmé, augmentant de 6 points chacun. À noter également que 44 % des employés se sont formés en visant une reconversion professionnelle. Un chiffre en accord avec notre précédente enquête sur le sujet.
Nouveauté cette année, le Baromètre s’est intéressé aux actifs qui n’ont pas suivi de formation au cours des 12 derniers mois. Les raisons invoquées sont :
- Le sentiment de ne pas en avoir besoin, et, cela, de manière très nette (66 % des actifs). Une affirmation encore plus marquée chez les indépendants, les ouvriers et les 50 ans et plus ;
- Le manque de temps est arrivé en deuxième position en particulier pour les cadres (4 sur 10) ;
- Les freins financiers ont été, quant à eux, moins présents, excepté pour les demandeurs d’emploi. Pour près d’1/4 d’entre eux, le reste à charge requis pour suivre la formation était, en effet, trop important.
Si la stabilité était au rendez-vous cette année, 2022 verra-t-il l’apparition de nouvelles tendances ?
Des souhaits de formation toujours aussi stables mais plus digitalisés
En 2022, il semblerait que la continuité restera à l’honneur dans les positions et les comportements des actifs à l’égard de la formation. Toutefois, la digitalisation devrait, cette fois, davantage s’affirmer.
Les Français et la formation professionnelle : les effets de la crise toujours présents
Il semble y avoir une certaine stabilité dans les intentions des actifs à l’égard de la formation. Et ceci quelle que soit la conjoncture. En revanche, l’influence de la crise sanitaire est toujours aussi présente. En effet, comme l’année passée, 6 actifs sur 10 affirment que la crise a eu un impact sur leurs projets de formation. Les facteurs sont nombreux : émergence de nouveaux besoins, contexte incitant à utiliser ses droits à la formation, inquiétude pour son emploi…
Le constat est encore plus prononcé chez les indépendants et les chefs d’entreprises (75 %). À l’inverse, 4 actifs sur 10 affirment que la crise n’aura eu aucune influence sur leurs projets de formation. Un avis principalement partagé par ceux qui sont déjà inscrits en formation (54 %) ou qui occupent leur poste depuis 3 à 5 ans (50 %).
Les motivations à se former resteront également les mêmes en 2022 et celles liées à la création d’entreprise continueront de progresser (13 %).
La certification prend de l’importance dans les choix de formation
Une nouveauté pour 2022 : dans le choix d’une formation, les actifs accordent désormais une importance majeure à la dimension diplômante ou certifiante (45 %). Les jeunes sont ainsi particulièrement concernés (62 % des 18-24 ans). Un fait sans doute à mettre en lien avec la place qu’a prise la certification dans de nombreux dispositifs et financements.
De fait, la certification Qualiopi est obligatoire pour les organismes de formation depuis le 1er janvier 2022. Toutefois, il faut savoir qu’elle ne certifie pas la qualité d’une formation mais celle de son processus de délivrance.
L’accompagnement apparaît également comme un critère de choix important (4 actifs sur 10), devant la durée de la formation (37 %) et le reste à charge (33 %). Celui de la modalité de la formation (présentiel ou distanciel) n’intervient qu’en dernière position. Il reste néanmoins plus élevé chez les 25-34 ans (26 %). Pourtant, ici, le digital s’affirme.
La digitalisation progresse dans les souhaits de formation
Dans leur projection en termes de formation professionnelle, le format en présentiel est encore présent pour 39 % des Français. Mais on remarque que la formation à distance séduit de plus en plus. Hybride (25 %) ou uniquement en ligne (28 %), ils sont 53 % à préférer le digital. En e-learning, l’auto-formation est plébiscitée par la moitié des répondants tandis que l’autre souhaiterait bénéficier d’un accompagnement individuel.
À l’heure du digital, les publics sont ainsi de plus en plus ouverts à ces formats. Si la crise a, encore une fois, agi comme un accélérateur, les organismes de formation doivent aujourd’hui répondre aux besoins de leurs apprenants en leur proposant des formats de qualité et adaptés. Il ne s’agit pas uniquement de mettre son contenu sur le web, mais bien de privilégier de nouvelles méthodes d’apprentissage. C’est un enjeu essentiel qu’il n’est plus possible d’ignorer. Tour comme celui de mieux informer sur les dispositifs de formation existants.
Connaissance des dispositifs de formation, CPF : du progrès mais peut mieux faire
Alors que le gouvernement a multiplié les dispositifs de formation pendant la crise pour favoriser la reprise, les Français restent peu informés sur ce sujet. CPF (compte personnel de formation), FNE Formation, Pro-A, qu’en est-il aujourd’hui ?
Les dispositifs de formation professionnelle encore peu connus des Français
Malgré une légère hausse depuis la première édition du baromètre, seule la moitié des actifs se considère bien informée sur les dispositifs de formation (46 %). Une opinion qui reste divisée puisque 53 % estiment qu’ils ne le sont pas. Les plus jeunes (64 %) et les cadres (61 %) font partie de la première catégorie quand les ouvriers appartiennent à la seconde (54 %). Toutefois les chiffres sont en progression (+ 5 pts depuis 2020), preuve d’une amélioration, certes modérée, mais constante.
Internet et l’employeur : les meilleurs moyens d’information
À la question « Quand vous avez besoin d’information pour réaliser vos projets de formation, par quel moyen vous informez-vous ? », pas de surprise. Internet reste la première source d’information pour 40 % des actifs et, plus particulièrement les 25-34 ans (46 %).
En seconde position on retrouve l’employeur (30 % des actifs), malgré une légère baisse (- 4pts) par rapport à l’année dernière. Un taux qui reste néanmoins plus élevé chez les salariés du secteur public (40 %) et les professions intermédiaires (36 %). Le conseiller Pôle Emploi reste l’interlocuteur privilégié d’1 demandeur d’emploi sur 2, alors que le CEP (conseiller en évolution professionnelle) reste marginal (6 % des actifs).
Concernant la connaissance des dispositifs, là encore, la stabilité est de mise. Le plan de développement des compétences de l’entreprise dispose d’une petite notoriété (25 % cette année, contre 23 % en 2021). Les dispositifs FNE Formation (9 %) et Pro-A (7 %) sont, quant à eux, peu connus. En revanche, le CPF de transition (35 %) bénéficie de la notoriété de son « grand frère » le CPF, encore en augmentation cette année.
Le CPF gagne en notoriété
En matière de connaissance des dispositifs, le CPF s’affirme comme le grand gagnant. Ainsi, 78 % des actifs assurent le connaître et 62 % (+7 pts) au moins un des aspects de son fonctionnement. C’est donc la moitié des actifs (50 %, +7 pts) qui savent désormais utiliser leur CPF et une proportion identique (+5 pts) qui a connaissance du montant dont elle dispose. Enfin, près de la moitié également (46 %, +6 pts) sait à quel type de formations elle peut accéder grâce au CPF.
La maîtrise croissante de son utilisation est ainsi à l’honneur cette année. On remarque toutefois que la méconnaissance de l’usage du CPF est plus répandue chez les diplômés bac+5 ou supérieur (46 %) et les salariés du secteur public (48 %). Ces derniers ont, en effet, bénéficié du dispositif après leurs homologues du secteur privé.
Conclusion : après la crise, les pratiques se stabilisent et les indicateurs se confirment
Le troisième baromètre Visiplus academy et BVA sur les actifs français et la formation professionnelle démontre bien une chose : la crise a eu un impact certain. Le secteur a été bouleversé, mais les changements engagés se stabilisent aujourd’hui et semblent s’installer sur la durée. Il faudra donc compter sur la formation à distance pour les années à venir, celle-ci séduisant de plus en plus de Français. Les dispositifs de formation mériteraient, en revanche, davantage de communication pour faciliter l’accès à la formation au plus grand nombre.
Un grand merci pour cet article qui me permet d’avoir une vision plus globale des évolutions autour de la formation qui me semble être le pilier incontournable pour ces prochaines années. Sans compter que la formation en ligne n’en est qu’à son début à mon avis.