Sur les 5 500 000 inscrits à Pôle Emploi au 1er novembre 2019, pas moins de 850 000 personnes sont concernées par la nouvelle réforme de l’assurance chômage : en plus de pouvoir bénéficier d’un accompagnement complet pour sa reconversion, il est également possible de poser sa démission et de toucher des allocations au chômage au même titre que n’importe quel demandeur d’emploi ! La reconversion professionnelle est désormais plus accessible que jamais. Le moment ou jamais de changer de vie ? Il y a tout de même quelques cases importantes à cocher avant de vous lancer. L’une d’entre elles notamment soulève quelques questions, puisque pour bénéficier de la mesure, il faut présenter un projet de reconversion jugé « réel et sérieux ».
Pourquoi cette mesure ? Quel sont les critères de sélection ? Quelles sont les étapes ? Comment faire sa demande ? Nous avons fait le point sur cette nouvelle situation.
Ce qu’il faut savoir avant de se reconvertir
Les Français, experts en démission
Vous connaissez sûrement ces électrons libres que l’on appelle « switcheurs », ou « slasheurs » ? Ceux qui, dans la lignée des travailleurs indépendants, fuient les codes du salariat traditionnel et maîtrisent l’art de la reconversion comme personne ? Sauf que ces travailleurs fugaces ne représentent que la partie visible de l’iceberg. La reconversion en France est un véritable enjeu pour tout le monde, et ce depuis des années. Les données sont là pour en témoigner : près de 40 % des ruptures de contrat en France en 2017 sont des démissions, auxquelles nous pouvons ajouter 10 % des ruptures conventionnelles.
Ce dernier format de rupture a été mis en place en 2008. Il était alors censé favoriser la reconversion professionnelle en laissant plus de temps aux futurs ex-salariés pour trouver un autre emploi, ou au moins de l’aide. À regarder l’évolution du nombre ruptures conventionnelles ces dernières années, le succès est au rendez-vous.
Sauf que les moins de 30 ans ne trouvent pas nécessairement leur entreprise et leurs managers rêvés dans la foulée. En ouvrant des droits au chômage, cette mesure ne fait donc que venir grossir les rangs de Pôle Emploi. En 2018, le nombre d’inscrits à la suite d’une rupture conventionnelle a officiellement dépassé les 400 000. Si le but reste d’inverser la courbe du chômage, l’heure est au changement de stratégie.
C’est dans ce contexte que s’inscrit l’idée de cette nouvelle réforme : faire de la reconversion un point central pour favoriser le retour à l’emploi. Le tout en ouvrant des droits aux l’allocation chômage aux démissions classiques, jusqu’ici plutôt contraignantes pour les salariés en quête de changement.
Les autres cas ouvrant un droit au chômage
C’était une règle bien connue jusqu’ici, en cas de démission, personne ne pouvait bénéficier de l’allocation chômage. Sauf que ce n’est pas tout à fait vrai. En plus de cette nouvelle mesure, il existe déjà toute une liste de cas de démissions également considérées comme « légitimes » ouvrant des droits à Pôle emploi. On parle ici de démissions justifiée par un déménagement, un mariage, une mission humanitaire ou encore un problème de violences conjugales. En tout plus d’une dizaine de situations répertoriées, vient s’ajouter celle du 1er novembre qui permet de se lancer dans un projet de reconversion plus sereinement.
Les éléments à prendre en compte pour bénéficier de cette nouvelle mesure
En plus des conditions classiques d’inscription à Pôle emploi comme l’âge, l’aptitude à l’exercice d’un emploi ou la résidence sur le territoire, il vous faudra d’abord remplir trois conditions spécifiques :
- La première réside dans le fait d’être en CDI au moment de la démission et de cumuler 5 années d’activité salariée de manière continue, chez un ou plusieurs employeurs, dans les 60 mois qui précèdent le départ. Les congés sans soldes, années sabbatiques et autres périodes de disponibilité ne sont pas prises en compte dans le calcul.
- La deuxième concerne la date de votre démission, qui doit impérativement être effectuée après le 31 octobre 2019. Toute démission réalisée avant cette date n’entre tout simplement pas dans le cadre de la réforme.
- La troisième consiste à proposer un projet de reconversion reconnu comme « réel et sérieux » aux yeux de Pôle emploi. Cela peut être un projet de reconversion, mais aussi de création ou reprise d’entreprise.
Par où commencer reconversion professionnelle ?
Les grandes étapes
Vous réunissez, ou pensez réunir, les trois conditions requises ? Parfait, mais ne posez pas immédiatement votre démission pour autant. Un site nommé demission-reconversion, spécialement mis en place par le Ministère du Travail, présente les quatre étapes clés à respecter afin de pouvoir prétendre auxdites allocations chômage.
Voici donc la démarche à suivre :
- Étape n°1 : vérifier si votre situation respecte bien l’ensemble des conditions d’admission imposées par Pôle emploi dans cette nouvelle démarche. Attention toutefois, remplir les conditions ne signifie pas admission, vous devez donc attendre avant de démissionner.
- Étape n°2 : élaborer le projet et faire une demande de conseil en évolution professionnelle (CEP). Ce programme vise à élaborer et mettre en marche un plan de reconversion 100 % personnalisé. Ici aussi une étape à réaliser impérativement avant de démissionner, pas après.
- Étape n°3 : valider le caractère « réel et sérieux » du projet auprès de l’organisme en charge de l’évaluation. Si c’est validé, vous pouvez enfin démissionner. Sinon, vous pourrez revenir à l’étape précédente et retravailler votre projet.
- Étape n°4 : après avoir suivi les 3 premières étapes, vous pouvez alors vous inscrire comme demandeur d’emploi dans les 6 mois suivant la validation de votre dossier. Passé ce délai vous aurez tout à recommencer.
Nos conseils pour réussir votre projet de démission/reconversion
Lors de l’étape n°1 : les conditions d’admission
Vous êtes salarié en CDI, c’est très bien, mais cumulez-vous bien les 5 années d’activité continue requises ? Sachez que les contrats en CDD réalisés avant sont bien pris en compte. Il faut simplement être en CDI lors de la démission. Temps complet ou temps partiel, cela ne change rien.
Pour vérifier si vous remplissez bien cette condition, complétez simplement ce document et renvoyez le à l’adresse mail indiquée dans les consignes. N’oubliez pas d’être précis afin de limiter les allers-retours.
Concernant votre projet de reconversion, n’hésitez pas demander à votre CEP avant de vous lancer dans la mise en forme de votre dossier. Autrement dit, anticipez directement avec eux l’étape n°2, vous aurez un bien meilleur aperçu sur la marche à suivre.
Lors de l’étape n°2 : la demande de CEP
Le CEP permet d’étudier l’ensemble des solutions pour mener à bien votre projet sans avoir à démissionner, il est gratuit, mais il est surtout obligatoire pour pouvoir toucher le chômage. Attention, si la demande est faite après la démission, le projet ne respectera pas les règles et vous ne pourrez bénéficier d’allocations. (On vous parle plus en détails du CEP un peu plus bas)
Lors de l’étape n°3 : la proposition de son dossier
À ce stade, vous devriez déjà avoir une meilleure vision de ce qui vous attend pour les années à venir. C’est aussi ici que vous obtiendrez l’attestation du caractère réel et sérieux de votre projet professionnel.
Si votre projet vise une nouvelle formation, n’oubliez pas d’étudier en amont, avec l’opérateur en charge du CEP, les différentes offres et modalités de financement de la formation.
Si votre projet vise à créer ou reprendre une entreprise, ne créez pas tout de suite les statuts. Car si elle est créée avant votre inscription à Pôle Emploi, vous ne pourrez pas bénéficier de l’aide à la création et à la reprise d’entreprise (ACRE).
Lors de l’étape n°4 : l’inscription à Pôle emploi
Vous avez atteint l’étape n°4, vous faites officiellement partie des chômeurs-démissionnaires de France. Attention tout de même penser à vous inscrire à Pôle emploi ! Vous ne disposez que de six mois qui suivent la validation de votre projet de reconversion pour le faire et c’est une démarche à réaliser personnellement. Vous recevrez alors, comme tout chômeur, une indemnisation à chaque début de mois.
Focus sur le conseil en évolution professionnelle (CEP)
Le CEP, qu’est-ce que c’est ?
Le CEP, c’est votre allié, votre guide, votre meilleur ami dans cette aventure. Il s’agit d’un service d’accompagnement sur mesure et gratuit, auquel toute personne active peut faire appel pour analyser sa situation professionnelle, faire le point, se poser les bonnes questions.
Que ce soit pour une évolution de poste, une création d’entreprise, ou comme ici une reconversion, les conseillers du CEP sont là pour vous coacher et vous mettre sur les bons rails. Alors un conseil, si vous avez une question notez-la, votre interlocuteur aura sûrement la réponse.
Déroulement d’un accompagnement
L’accompagnement du CEP comprend trois niveaux, mobilisés (ou non) en fonction de la situation et du projet de la personne :
Niveau 1 : l’analyse
Chaque bénéficiaire commence par analyser sa situation professionnelle avec l’aide d’un conseiller. Cela permet de définir un premier plan d’attaque. Si ce dernier est déjà clairement défini, le CEP oriente directement les personnes vers les organismes adaptés.
Niveau 2 : le conseil personnalisé
Phase clé — et 100% personnalisée — du processus, durant laquelle les étapes de la reconversion sont clairement définies et organisées par ordre de priorité. L’accent est notamment mis sur les éventuels besoins en formation et sur la faisabilité générale du projet.
Niveau 3 : la concrétisation du projet
Dernière ligne droite, plus ou moins longue, durant laquelle le plan est mis à exécution. Le bénéficiaire reçoit toujours un appui pédagogique, mais le but ici reste que la personne puisse faire des choix éclairés et autonomes, autrement dit : voler de ses propres ailes.
Où faire sa demande ?
Jusqu’au 31 décembre 2019, les demandes de CEP s’effectuent auprès d’institutions, organismes ou opérateurs comme l’APEC, les Cap emploi ou les FONGECIFS. Vous pouvez facilement trouver l’organisme le plus proche en vous référant à cette carte du Ministère du Travail :
À noter : ni Pôle Emploi ni les missions locales ne pourront vous aider lors de cette étape.
En conclusion, malgré des conditions à bien respecter (être en CDI, avoir cumulé 5 années de travail, démissionner après le 31 octobre, avoir un projet de reconversion « réel et sérieux »), cette réforme permet bel et bien d’ouvrir des droits au chômage en cas de démission. La reconversion professionnelle n’a donc jamais été aussi accessible qu’aujourd’hui ! Autre bon point, le renforcement de l’accompagnement 100 % personnalisé proposé par le CEP, véritable coach et ange gardien pour faire face à toutes ces démarches.